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Reportage au camp de Diavata en décembre 2016

A la mi-décembre 2016, le camp de réfugiés de Diavata, jusqu'alors constitué de baraquements militaires et de tentes (photo satellitaire © Google Maps ci-après) a été aménagé avec des bâtiments de type Algeco équipés d'un climatiseur chaud/froid permettant, à défaut d'un grand confort car on dort en général à même le sol (seules les femmes enceintes ou les femmes très âgées peuvent disposer d'un lit), de disposer d'un chauffage. Quoique situé en bordure de mer, la région de Thessalonique est très froide l'hiver, il y neige fréquemment et les températures inférieures à -10° ne sont pas exceptionelles.

Le camp de Divata a été aménagé sur l'ancienne base militaire d'Anagnostopoulou et officiellement ouvert le 24 février 2016, en grande pompe puisque le gouvernement grec y avait installé un bureau d'accueil pour les journalistes. Dès avril le camp a cependant été interdit aux reporters qui ne peuvent plus y pénétrer que de façon illégale.
Sur le cliché ci-après, les anciennes baraques militaires (à gauche) jouxtent les tentes. Au plus fort de son utilisation en mai 2016, le camp de Diavata a compté 2.320 réfugiés, principalement des Syriens (à 75 %) dont 45 % avaient moins de 18 ans. Un mois plus tard, ils n'étaient plus que 1800. Depuis le nombre ne cesse de décroître petit à petit, de nombreuses initiatives humanitaires privées les aidant à momentanément vivre en appartement ou en hôtel dans l'attente de leur traitement de demande d'asile (tous veulent rejoindre un pays européen autre que la Grèce, Allemagne et Angleterre en première demande). En décembre 2016, ils sont encore 800 à résider dans ce camp.

Les traces de l'ancienne base militaire sont bien visibles. On peut aussi remarquer que la déliquescence de l'administration grecque se voit à tous les niveaux : le grillage d'enceinte est en effet inexistant au pied de cette casemate de surveillance. C'est de cette façon qu'il est possible de rentrer illégalement dans le camp (les passages de ce type sont au nombre de quatre). La menace d'arrestation et d'emprisonnement (pour entrée illégale sur une base militaire) est cependante suffisante pour dissuader quiconque de pénétrer.

Le camp de Diavata est situé sur une légère colline, à l'écart du moindre commerce, presque perdu au milieu des champs (il faut marcher environ deux kilomètres avant d'atteindre la première boutique). Par temps sec, on peut apercevoir la mer.
Les structures nouvellement installées permettent aussi aux réfugiés d'avoir de l'électricité et ainsi de pouvoir recharger aisément un smartphone, utiliser une cafetière ou une petite plaque chauffante sans mettre en péril toute l'installation du camp puisque chaque logement dispose d'un disjoncteur. Chaque famille dispose d'une structure en dur. Y résider à cinq est cependant aussi peu aisé que sous une tente. Contrairement aux camps sauvages existants juqu'au début juin 2016, les activités sociales, culturelles et de loisirs offertes ou organisées par des ONG (Organisation non gouvernementale) sont totalement inexistantes dans ces camps puisque les humanitaires y sont interdits d'accès.

En l'absence d'eau chaude, le linge n'est lavé qu'à l'eau froide. En l'absence d'équipements prévus à cet effet, tout est bon pour étendre le linge.
Un détail sur la photo montre le dénuement moral qui affecte ces réfugiés. On aperçoit un lit qui n'est pas utilisé alors qu'il pourrait rejoindre une des structures plus pérenne installée depuis la mi-décembre. Le camp est dans un état de délabrement avancé. Personne dans le camp, c'est-à-dire aucun réfugié, ne prend le parti d'organiser les choses et de nettoyer un peu l'ensemble, c'est-à-dire de réunir en un seul endroit les traces des équipements devenus obsolètes : anciennes baraques militaires ou tentes abandonnées.

Ci-après, un autre accès "libre" au campement. Il est nullement intéressant pour l'administration grecque de fermer ou surveiller ces ouvertures puisque le règlement est clair : pénétrer dans le camp est illégal pour quiconque (visiteur, humanitaire, journaliste), certains réfugiés n'hésitant d'ailleurs nullement à dénoncer toute présence étrangère et ce pour diverses raisons (volonté de se montrer coopératif avec les autorités facilitant ainsi le traitement de la demande d'asile, habitude de la délation instaurée comme mode de fonctionnement politique et sociétal par le régime Assad, souhait d'être tranquille et de ne pas subir le voyeurisme de certains reporters peut respectueux de la déontologie journalistique – de plus en plus de réfugiés se défient de la presse –, souhait personnel de ne pas être reconnu car fuyant le régime syrien pour des raisons politiques ou d'emprisonnement, etc.).

Les baraques ou les tentes délaissées servent de terrain de jeu aux enfants qui y jouent ... à la guerre. Ces baraques intialement utilisées étant peu étanches à l'eau, il avait fally y placer des bâches de l'UNCHR (Haut commissariat des Nations Unies aux réfugiés) afin de protéger les réfugiés de la pluie.

Ci-après, l'ancienne allée principale du camp qui mène à l'entrée et au poste de police. On aperçoit tout au fond à gauche la route qui dessert le camp. Le jour de cette prise de vue (ci-dessous), il gelait à pierre fendre, ce qui explique le givre blanc au sol.

Les lits sont très peu fréquents dans les camps. Seules les femmes enceintes ou les personnes âgées en disposent. Quand les familles quittent le camp (pour diverses raisons : installation dans un appartement ou un hôtel, relocalisation dans un pays européen, retour au pays d'origine), les lits sont réatribués en fonction d'une loi simple : premier arrivé, premier servi. La majorité des personnes dorment donc sur un matelas de mousse posé à même le sol. C'est une évolution sensible que d'avoir le matelas posé sur un sol en dur, mais c'est une évolution récente puisque la majorité des réfugiés de ce camp dorment sous une tente depuis parfois février 2016.
Ces baraques ne disposent pas de point d'eau, de toilettes ou d'équipement sanitaire. Ceux-ci sont regroupés en deux endroits du camp, ce qui est peu pratique par grand froid ou la nuit et peu sécuritaire pour les femmes qui s'y rendent accompagnées.

 

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