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Visite du camp de réfugiés de Vasilika en décembre 2016

Tout comme le camp d'Oreokastro, le camp installé sur la commune de Vasilika, une vingtaine de kilomètres à l'est de Thessalonique, est abrité dans une ancienne usine désaffectée intialement destinée au conditionnement des volailles (la Kordogiannis Farm). Il a été ouvert au tout début du mois de juin 2016 afin de recueillir les centaines de réfugiés qui s'étaient installés sur une aire de service EKOnomic de la route qui relie Thessalonique à Skopje, une trentaine de kilomètres au sud de la frontière macédonienne. Le bâtiment est gigantesque, constitué de 11 halles, d'une longueur totale de 260 mètres sur 50 de large (photo satellitaire © Google Maps ci-après).

L'installation des réfugiés dans ce camp a débuté sous de mauvais hospices puisque des Grecs hostiles à la présence de réfugiés sur leur commune ont violemment manifesté lors de l'arrivée des réfugiés et des heurts se sont produits entre ces Grecs, les réfugiés et les forces de l'ordre, entraînant de nombreux blessés, les réfugiés (ne comprenant pas la langue grecque) pensant que ces personnes venaient les accueillir et les Grecs (ne comprenant pas l'arabe) pensant que les réfugiés venaient à leur rencontre pour les menacer alors que ces derniers venaient les remercier. Les forces de l'ordre ont alors dû faire usage de gaz lacrymogènes pour repousser les manifestants.
La cohabitation reste difficile entre autochtones et réfugiés. Quand l’administration grecque a installé 26 grosses plaques chauffantes pour que les réfugiés puissent cuisiner, des Grecs sont venus en voler 22 la nuit même suivant leur installation. Les plaques chauffantes ont été remplacées mais au cours du week-end suivant, 20 ont à nouveau disparu, de même que les stocks d’eau destinés aux réfugiés ! Deux intrusions de pédophiles ont aussi été découvertes, de même qu’une tentative d’abus sur une jeune femme. Quoique interdit à tout type de visite, le camp est en effet totalement ouvert dans sa partie est, ce qui fait qu’il est même possible d’y entrer en véhicule (ce qui explique le vol des plaques électriques). Ce n’est qu’en décembre que l’administration a décidé de bâtir un mur le long de la route afin, dans un premier temps, de protéger les enfants et d’éviter qu’ils n’aillent jouer le long de la route. A priori, il n’est pas prévu que ce mur ceinture la totalité du camp.

Une des deux entrées non surveillées à l'est du camp. A gauche sur le cliché ci-dessous, la construction d'un mur le long de la route.

Ci-après, vue globale du camp de la route qui relie Thessalonique à Poligorou. Ce campement de 1200 places est, comme ses homologues, fort éloigné des premiers commerces puisque le village de Vasilika est à 4,5 km, le village de Nea Redestos à 4,8 km et la ville de Thessalonique à 20 km. C'est un des camps les plus éloignés de la capitale régionale, ce qui fait que les réfugiés y sont très esseulés.

Si vivre sous une tente dans un hall d'usine ne peut en aucun cas être une situation satisfaisante (les réfugiés y sont depuis la mi-juin 2016), le camp de Vasilika est un de ceux qui fait le plus miséreux, froid et triste, d'autant que la hauteur sous plafond y est assez basse, en tout cas plus basse que les camps de Softex ou Oreokastro. Seule différence (notable) avec les autres campements, c'est qu'une structure d'aide installée à l'origine sur l'aire de service EKO pour aider le camp sauvage du même nom, dénommée EKO Project, s'est récréée à 350 mètres de l'usine, dans une ferme, et propose diverses activités (repas à midi durant la semaine, espace pour les mamans, librairie et activités spécifiques tel un arbre de Noël et des cadeaux pour tous le 25 décembre).
Si les bâtiments sont lugubres, le camp bénéficie cependant de diverses installations complémentaires : structures de type Algeco ou tentes pour abriter des activités scolaires ou culturelles par exemple (il semble que l'administration grecque veuille en faire une solution pérenne quoiqu'il n'y ait toujours que 8 douches !). La région étant assez froide et les installations sanitaires (lavabos) étant à l'extérieur, elles sont inutilisables du fait du froid actuel (tout y est gelé le 7 janvier 2017 et donc totalement inutilisable). Lors de la prise de vue ci-dessous, le 24 décembre 2016, il faisait -6°. A l'opposé, le toit constitués de plaques de métal s'est avéré une catastrophe durant l'été 2016, le camp se transformant en véritable étuve.

Le camp comptait officiellement 1250 réfugiés (dont 55% d'enfant) le 1 novembre 2016 (pour 1500 places potentielles ou 630 tentes). Au 23 décembre, ils ne sont plus que 400 (les réfugiés sont installés dans des hôtels ou des appartements), le 7 janvier ils ne sont plus que 160 mais si le camp est vidé, ce n'est pas pour le fermer mais à priori pour y placer les réfugiés des îles (où ils sont près de 20.000 pour 8.000 places).
Plusieurs réfugiés m'ont parlé de rats (mais je n'ai rien constaté de tel ou vu de clichés le prouvant). Dans ce camp comme dans les autres visités à la même période, à chacun de mes passages, j'ai pu constater des coupures électriques, qu'elles soient générales (tout un hall par exemple) ou locales (du fait d'un chauffage d'appoint qui "tire" trop sur la ligne dévolue à la tente). Les deux seules ONG présentes (c'est-à-dire acceptées par les autorités grecques) sont les italiennes Firdaus (en réalité dans le Tessin suisse, à côté de Côme) et MAM Beyond borders (qui font vraiment leur possible pour aider les réfugiés).


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